Sauterelles et miel sauvage Partie 4 : ALIBI (Lc 3,8)

Chers amis,

Pendant le Carême 2021, nous avons proposé en Allemagne un itinéraire spirituel à travers le Carême pour les membres de l'Ordre, les jeunes et les œuvres. Il s'intitulait "Sauterelles et miel sauvage" (Mt 3,4) - Jeûner avec Jean-Baptiste. Grâce à Emilie Verbeken, ces impulsions hebdomadaires ont également trouvé un écho en Belgique. C'est ainsi qu'est née l'idée de proposer et de publier les méditations de jeûne sur Jean-Baptiste pour les personnes intéressées dans d'autres pays. Je remercie chaleureusement Emilie Verbeken et Florentine Haeusgen pour cette idée et sa réalisation - surtout pour la traduction de l'allemand vers le français et l'anglais. Ce serait bien si, de cette manière, notre Saint Patron pouvait nous aider à vivre une période de conversion fructueuse.

A tous un temps de Carême béni et un renouveau de l'âme et du corps,

Fra' Georg Lengerke

Lorsque j'étais étudiant, j'ai un jour aidé un oncle, un moine bénédictin, à trier un tiroir contenant toutes sortes de papiers. À un moment donné, nous nous sommes tous deux penchés sur une liste d'ancêtres. Elle allait de sainte Hedwige de Silésie (+1243) à ses parents et mes grands-parents. Vingt-trois générations.

L'histoire de la transmission de la vie d'une époque à l'autre, d'une génération à l'autre et d'une histoire de vie à l'autre se dressait devant nous, mystérieuse. Il y avait là un singulier mélange de grandeur et de gravité.

A un moment donné, l'oncle a fait remarquer sobrement : « Eh bien, la moitié du couvent descend probablement de sainte Hedwige. Seulement, ils ne peuvent pas le prouver ». L'affaire fut ainsi réglée et le papier disparut dans l'un des classeurs nouvellement créés.

Lors de son cri de repentance abrupt, Jean le Baptiste anticipe d'emblée un alibi possible : « Produisez donc des fruits qui expriment votre conversion. Ne commencez pas à vous dire : Nous avons Abraham pour père, car je vous dis ; de ces pierres Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham ! » (Lc 3,8)

Ne commencez même pas ! Vos ancêtres, votre histoire familiale, vos origines ne sont pas une excuse. Il s'agit de vous-mêmes. C'est vous-mêmes dont la conversion doit être fructueuse.

Il y a deux façons dont nos ancêtres peuvent devenir un alibi : soit parce que nous nous attribuons leurs mérites, soit parce que nous nous excusons de leur culpabilité.

Il est vrai que les deux nous viennent de nos ancêtres : d'une part, une certaine tradition et culture, une attitude envers Dieu et les hommes, d'autre part, l'empreinte de ce que nos ancêtres ont subi ou commis.

Nous devons nous interroger sur les deux, nous devons faire face aux deux, nous devons d'abord les accepter. Pour l'un, il faut remercier, s'approprier et développer - et pour l'autre, il faut demander une solution, une guérison et un pardon.

Mais nous ne serons pas jugés un jour sur ce que nos ancêtres nous ont transmis. Mais sur la manière dont nous aurons géré cet héritage.

La demande de réponse des foules au verdict du Baptiste semble désemparée : « Que devons-nous faire ? » Jean ne demande rien de grand - ou plutôt, c'est dans les petites choses que se trouve la grandeur. Il s'agit simplement de faire le bien qui vient à l'esprit et de s'abstenir du mal : Il ordonne à tous de partager ce qu'ils ont. Les publicains ne doivent pas prendre plus que ce qui leur est dû, et les soldats ne doivent maltraiter ni rançonner personne et se contenter de leur solde (Lc 3,10-14).

C'est à cela que j'ai pensé dimanche en lisant les dix commandements (Ex 20,1-17), à savoir que nous devons faire ce qui semble petit dans la fidélité : faire de la place à Dieu. Avec lui, reconnaître et aimer son prochain. Honorer ceux à qui l'honneur est dû. Nous confronter à la vérité, lui rendre hommage et ne plus mentir à nous-mêmes et aux autres. Et accorder de tout cœur au prochain ce qui lui appartient au lieu de l'envier.

Cela vaut également pour nos ancêtres et leur héritage. Avec l'aide de Dieu, nous pouvons faire face à notre héritage – dans le bien comme dans le mal. Nous pouvons confier nos ancêtres à la miséricorde de Dieu. Pour notre propre vie nous devrons rendre compte.

Le fruit qui en résultera sera grand…

Fra' Georg Lengerke